PP002

Usual Globality
Daniel Firman

Daniel Firman, artiste plasticien, a inauguré, au printemps 2001, la première résidence d’artiste au sein du campus HEC.

Usual Globality

Résidence, Installation
08.2001 — 05.2001

Artiste
Daniel Firman

Lieu
Campus HEC

Un espace d’exposition divisé en deux espaces identiques, deux cellules placées l’une à côté de l’autre, murs blancs, moquette rouge: les entrées se font face. Chaque cellule contient un même ensemble défini d’objets (cartons, seaux, tuyaux, chaises en plastique, etc.). D’un côté, les objets ont été assemblés par l’artiste. De l’autre, c’est au public de réaliser librement l’assemblage. Il s’agit, dans les deux cas, de créer une construction stable, sur un mode aléatoire, en n’usant d’aucune fixation et en jouant des qualités spécifiques de chaque objet.

Résultat: deux sculptures occupant chacune leur cellule respective. L’une préexiste à l’autre, elle est conçue et réalisée par l’artiste. L’autre est réalisée par un ensemble de personnes ayant répondu spontanément à son invitation. Daniel Firman est l’auteur de l’ensemble du dispositif: disposition spatiale, choix des objets, invitation du public, etc. La symétrie engendre l’évaluation comparée des parties. L’assemblage de l’artiste joue le rôle de référent pour l’assemblage du public. Les résultats obtenus sont comparables, mais pas identiques. Ils s’affirment l’un et l’autre comme deux variations sur un même principe. L’oeuvre intègre la participation du spectateur: elle l’engage dans une expérience physique et réflexive.

Le public perçoit ainsi l’oeuvre directement sur ce qui la fonde: la relation corps / objet / espace. À l’image de notre rapport quotidien (usuel et global) aux objets et à l’espace, les deux sculptures sont deux combinaisons, parmi une infinité d’improvisations susceptibles, deux accumulations saturées d’objets hétéroclites marquées par le potentiel physique et imaginatif des constructeurs. Daniel Firman est notamment connu pour ses personnages supportant d’extravagantes accumulations d’objets sur leurs épaules. Le principe de réalisation de ses Gathering est le suivant: un individu se tenant debout (potentiellement l‘artiste lui-même) se voit progressivement chargé d’objets les plus divers jusqu’à la limite de ses forces. Une fois cette limite atteinte, le performeur est remplacé par un mannequin fabriqué à son image auquel on superpose un assemblage exactement identique à celui de la performance.

Le corps (dont on ne perçoit plus que la moitié inférieure) devient ainsi le support et le socle d’un absurde conglomérat d’objets, tel un improbable atlante tout encombré de son dérisoire chargement. Bien que différente, Usual Globality présente certains points communs fort éclairants avec cette oeuvre. D’un côté la performance de l’artiste, de l’autre sa reconduction, l’idée d’une sculpture tirée d’une performance physique, l’équilibre précaire de l’assemblage lié à sa verticalité délibérée. Il s’agit bien, dans les deux cas, d’oeuvres marquées par une réflexion à la fois grave et ludique sur notre condition d’aliénés consentant au monde des objets.

Philippe Coubetergues, critique d’art

Daniel Firman, né en 1966 à Bron, est un artiste français qui vit et travaille à Bordeaux et New York. Il a été le premier artiste invité en résidence sur le campus HEC Paris en 2001. Daniel Firman est un artiste avant tout visuel, il construit de la «présence». Pour lui, la forme en empreintes (du corps, du temps, de l’objet ou encore du mot) est essentielle, elle doit être «efficace» mais aussi faire face à un principe d’image. Si d’apparence son travail fait écho aux questions traditionnelles d’un sculpteur classique (poids, forme, matière, corps, gravité, modalité de création), c’est d’un point de vue totalement actuel, en prenant l’espace de travail comme un espace lié au vivant, à la performance et à l’effort, pour être dans le geste et ne pas faire de la sculpture un programme de sculpteur.