A-rena di Anacapri
A-rena di Anacapri est une aventure qui est née à Paris, au sein de l’Espace d’art contemporain HEC, quand Mario et Dora Pieroni de RAM radioartemobile avec Anne-Valérie Delval ont regroupé des artistes, des critiques et des chefs d’entreprise autour d’une table ronde pour réfléchir à la possibilité d’un dialogue entre art et industrie. Depuis de nombreuses années, les rencontres D/A/C (Dénomination Artistique Réciproque), mettent en avant l’idée de constitution d’un réseau de relations, d’une recherche de formes alternatives participant à l’ouverture du monde industriel qui souvent, requiert une curiosité au sein même des dynamiques de production, des logiques du marché et des coïncidences engendrées par ses associations.
A-rena di Anacapri
Exposition
05.2015 — 09.2015
Commissaire d'exposition
Giuliano Sergio
Artistes invités
Antonello Curcio
Athina Ioannou
Florent Lamouroux
Benjamin Sabatier
Donatella Spaziani
Invité spécial
Fabrice Hyber
Lieu
Galleria CapriClou
Suite à cette rencontre, six artistes investissent un espace commun avec des œuvres réalisées pour des commandes en lien avec le monde de l’industrie. Ces travaux expérimentent un «glissement» par rapport aux pratiques habituelles, pour élever un modèle artistique toujours plus monolithique, un système de l’art contemporain qui tend à uniformiser des modalités de production et de réception. La rencontre avec le monde de l’industrie ne se présente plus alors seulement comme «utile» mais devient essentiel pour les artistes et les entrepreneurs car il offre un espace de recherche miraculeusement gratuit, où pouvoir perdre le fil entre le sujet et le produit repense l’art comme simple relation, système, jeu.
Cette dialectique est développée dans cette exposition. Tout d’abord, Fabrice Hyber avec ses POF (Prototypes d’Objets en Fonctionnement) réinvente les formes et les fonctions des objets du quotidien. Hyber a d’ailleurs fondé une société la UR (Unlimited Responsability) avec l’objectif de produire ses œuvres et celles d’autres artistes, mais surtout pour amener l’art dans l’univers du consommateur, le démystifiant avec la force de son ironie: «Les POF sont des ouvertures-explique t-il- des possibilités».
Ceci est la responsabilité illimitée que l’artiste assume et qui permet à la société d’avoir une fonction vitale. Dans cette optique, Donatella Spaziani comprend la production industrielle comme un espace esthétique, un processus où se greffe la propre intervention, non pour «orner» ou «embellir», mais pour modifier la finalité et les résultats de fabrication, indiquant une présence existentielle intrinsèque à l’objet produit: c’est ainsi que son propre corps devient objet de mesure, silhouette qui apparaît dans l’espace domestique, sur les murs et les carreaux et, qui constitue en même temps la forme qui compose les assises et les matelas qu’elle crée.
Athina Ioannou considère en revanche l’artiste même comme un entrepreneur, son travail pictural débute par la conception d’un élément: une table, qui, par la suite s’étend et concentre l’espace, l’investit à travers un rythme de module de lumière et de couleur. Antonello Curcio utilise la technique industrielle pour créer des citations picturales qu’il transfère sur des serviettes de toiles de Jouy alors que Florent Lamouroux s’intéresse aux symboles de l’usine: ses travaux sont une «production supplémentaire de l’industrie», où les gestes, les uniformes et les objets deviennent des icônes avec lesquelles l’artiste se confronte.
Enfin, Benjamin Sabatier crée des systèmes prédéfinis qui invitent le public à produire une œuvre selon des instructions données. Sa recherche renvoie à l’expérience esthétique du 19ème, notices qui rappellent l’histoire des rapports entre les industriels et les artistes et qui, aujourd’hui peut être ré-interprétée consciemment .
Quel rapport avec Capri? Plus qu’il n’y paraît si l’on pense à son rôle de «port franc», de vitrine internationale où depuis toujours se mettent en scène les apparats du pouvoir. À Capri, ces objets, loin des usines et des musées trouvent leur signification parmi le néoclassicisme du jardin de Federico Guiscardo, petite arène où l’on peut mesurer la puissance ironique des balançoires, des fontaines, des masques, des tables et des sols constitutifs d’un des lieux les plus étincelants de l’histoire.
Giuliano Sergio, commissaire de l’exposition.